Le 12 mai 2014, à la demande du Ministre de l’Economie et du Commerce extérieur du Grand-Duché de Luxembourg, l’Autorité de la concurrence luxembourgeoise (le « Conseil ») a rendu un avis sur le projet de loi n°6588 portant sur l’organisation du secteur des services de taxis et modifiant le code de la consommation luxembourgeois actuellement en cours d’examen (l’ »Avis » et le « Projet de Loi »).
Dans le cadre de la préparation de cet Avis, le Conseil a mené une enquête approfondie sur le terrain et conduit une série d’entretiens avec les acteurs du secteur afin de former son opinion quant à son cadre législatif et économique. D’une manière générale, le Conseil retient que la situation actuelle du secteur des taxis n’est pas satisfaisante et nécessite donc une réforme urgente.
Dans son Avis, le Conseil procède tout d’abord à un rappel historique de la régulation du marché des taxis avant de décrire son fonctionnement actuel.
Comme dans de nombreux autres pays, les prix pratiqués par les taxis au Luxembourg sont strictement réglementés. Dans son Avis, le Conseil opère une distinction entre la période précédant et la période suivant l’entrée en vigueur de la loi luxembourgeoise du 17 mai 2004 sur la concurrence, qui proclame le principe de la liberté des prix.
Suite à la loi du 11 mars 2008 portant modification de cette loi du 17 mars 2004, les Ministres luxembourgeois de l’Economie et du Commerce extérieur et du Développement durable et des Infrastructures ont commandé, à un consultant externe, une étude sur l’industrie des taxis qui comportait un examen détaillé des coûts des entreprises de taxi couplé à celui d’un projet de réforme avorté. Ce dernier prenait en compte l’expérience de plusieurs autres pays, au regard des spécificités de la situation du Luxembourg, et prévoyait la création de trois catégories de véhicules à louer : les voitures « de location », les taxis « privés » et les taxis « publics ». En outre, en ce qui concerne l’accès au marché, ce projet de réforme devait privilégier des critères qualitatifs par rapport aux critères quantitatifs. Les principaux enjeux qui avaient alors été identifiés par les deux Ministres concernaient les consommateurs et la qualité des services, la liberté d’entreprendre et la concurrence ainsi que l’efficacité du marché et les questions environnementales.
Dans son Avis concernant la situation actuelle du marché des taxis au Luxembourg, dans lequel le Conseil rend également compte de la situation dans plusieurs Etats membres de l’UE (dont la France, où le Conseil relève que les taxis classiques sont désormais en concurrence avec les VTC (véhicules de tourisme avec chauffeur), lesquels sont moins réglementés et, en général, sans tarif fixe), le Conseil relève, pour sa part, que le fonctionnement du secteur n’est pas optimal.
Le Conseil indique deux problèmes majeurs qu’il convient, selon lui, de résoudre : d’une part, l’incertitude du cadre réglementaire qui a favorisé l’apparition de services alternatifs proposant des courses avec des structures de prix différentes de celles définies par la réglementation en vigueur applicable aux taxis « classiques », ou à des prix inférieurs à ceux pratiqués par ces mêmes taxis « classiques ». Et, d’autre part l’existence de certaines anomalies concernant les conditions d’attribution des licences.
Le Conseil relève également que le Projet de Loi prévoit des restrictions quantitatives et territoriales, qui pourraient, selon lui, entraîner une hausse des prix. En outre, le Conseil estime que le secteur des taxis est un marché oligopolistique dominé principalement par quelques grands groupes avec des prix supérieurs au niveau concurrentiel. A cet égard, le Conseil relève que l’exposé des motifs du Projet de Loi n’explique pas les raisons du rationnement des licences des taxis et que certains représentants de grands groupes avancent qu’une ouverture du marché détruirait leurs marges au détriment des services offerts. En réponse, le Conseil rappelle que ce n’est que par le jeu de la concurrence que les consommateurs disposeront des meilleurs services aux meilleurs prix et conclut en indiquant que le Projet de Loi favorise la structure actuelle du marché en protégeant les entreprises en place sur le marché aux détriments des nouveaux entrants ; le Conseil préconise, dès lors, l’abandon des licences pour ouvrir le secteur à la concurrence.
Le texte complet de l’avis peut être consulté ici.
Source : Conseil de la concurrence, Grand-Duché de Luxembourg